Faisons connaissance avec la famille
francique élargie!
Pour ceux qui recherchent
des explications plus linguistiques et plus détaillées, reportez-vous à la
rubrique "critères linguistiques".
La famille francique chevauche
les trois grandes aires dialectales du bassin allemand. Cela en fait un cas
unique parmi les grands dialectes souches de l'empire allemand (Saxon, Souabe-Alémanique,
Bavarois, Thuringeois)
Si l'on ne tient pas
forcément à représenter cette famille francique de manière globale, c'est parce
qu'elle ne coïncide pas avec un Etat ou une région qui permettraient de
l'identifier de manière claire à l'instar de
Il est intéressant de
constater que la partie lotharingienne comporte les régions qui ont donné des
nouvelles langues nationales ou officielles ou une langue régionale minoritaire
pour
La carte ci-dessous montre
les grandes aires dialectales appartenant à la grande famille francique. On
remarquera que le département de
En Moselle, on parle les dialectes
franciques rhénan (G), mosellan (E) et luxembourgeois (F). Les sites officiels
luxembourgeois décrivent certes leur
langue nationale comme une variante du francique mosellan, mais pour bien
matérialiser les choses, nous
maintiendrons la distinction entre E et F.
De même, aux Pays-Bas
(zone A), on aurait pu différencier le hollandais des dialectes de Groningue,
de Drenthe et d'Overijssel où l'influence friso-saxonne (bas-allemande) est
très marquée. Ce sont les zones interaréales entre le bas-allemand et le
bas-francique, voire néerlandais. Le frison (en blanc) et le limbourgeois (B)
sont des langues régionales minoritaires selon la charte de l'UE.
L'espace dialectal
francique étant au contact de plusieurs aires majeures, il est traversé par des
lignes qui matérialisent des différences de prononciation d'un son germanique
commun. Grâce à ces lignes, les linguistes ont défini les grandes aires
dialectales. Il serait stupide de les percevoir comme figées. Il existe un
continuum d'un micro-dialecte vers l'autre. En Moselle du Sud-Est, on entend
par exemple les uns dire "Pfiff" et les autres "Piff"
(Pipe). Cela ne dérange en rien l'intercompréhension.
L'une de ces lignes distinctives
est la ligne de Spire qui porte sur P / PF. Prenons la pomme : Apfel ou Appel. Elle
ne nous concernerait pas s'il n'y avait pas un tout petit coin du Sud-Est
mosellan où l'on prononce PF et non P comme tous les Mosellans.
Comme on le voit sur la
carte, le monde francique est majoritairement dans la sphère du P.
L'autre ligne qui sépare
l'aire du T de celle du S dans les mots das, was, es / dat, wat, et s'appelel la ligne de
Saint-Goar; elle traverse le département de
"Wàs isch dàs ?" et "Wat as dat ?" sont les
deux manières d'exprimer de chaque côté de la ligne "Qu'est-ce que
c'est?".
Cet aspect est important
sur le terrain car il permet de reconnaître les franciques rhénans d'un côté,
les mosellans et luxembourgeois de l'autre. C'est un signe distinctif infaillible.
Dès que vous entendez ou lisez un "dat", vous n'êtes plus en zone
rhénane (sur la carte en jaune G ). la consonance des "dat"
"wat" rapproche évidemment du bassin bas-allemand et bas-francique.
La ligne de Coblence qui
porte sur la distinction faite entre op et of ("sur",
allemand "auf", anglais "up") traverse également le département
de
Cette fois, le francique
mosellan tire vers l'aire moyen-allemande alors que le luxembourgeois continue
de prendre un caractère plus orienté vers les langues du Bénélux.
Il ne faut pas confondre
cette ligne du op/of avec la ligne de Bad Honnef portant sur Dorp / Dorf
(village) qui ne touche plus les franciques de Moselle. Le dernier dialecte de
Moselle au contact des langues du nord (bas-allemandes) n'a pas généralisé le
maintien de la prononciation de tous les P germaniques en P. Cela permet de
reconnaître le Néérlandais ou le
Plattdütsch du Nord de l'Allemagne du francique luxembourgeois aux
confins de cette aire.
D'autres lignes continuent de traverser l'aire
francique, mais les dialectes mosellans sont tous situés au sud de ces lignes.
L'une des plus frappantes à l'oreille est la ligne de Benrath qui porte
sur les K / CH (machen / maken
"faire" ). Elle sépare le francique central (D) du bas francique
(A,B,C). Elle coïncide presque avec la ligne de Uerding qui fait la
différence entre "ich" et "ik" qui traverse C et B.
Une fois dépassées ces
deux lignes, on se trouve dans le bassin bas-allemand de par la consonance
générale.
du Nord-Ouest au Sud-Est
(A à I):
ik eet een appel – ëch
ess eïn appel – eich ess e äppel – ich ess e àppel – ich ess a apfel
La situation des
franciques de Moselle est aussi intéressante à observer au sein de la famille
francique élargie. Là aussi, ils remplissent leur rôle de transition quand on
observe les voyelles. Dans les langues
germaniques, certaines ont tendance à prononcer les voyelles très brèves,
d'autres utilisent de nombreuses diphtongues (deux voyelles fusionnées ensemble
pour donner un son spécifique). Aux extrémités du bassin francique, le
néerlandais et le franconien ont de nombreuses diphtongues. Inversement, la région de Moselle en terre
francique rhénane orientale se distingue par sa forte représentativité en
voyelles brèves (monophtongues).
Cet aspect est également
important à retenir pour différencier en Moselle la zone G de E/F. Chaque
région joue son rôle de transition. On observe, par exemple, qu'à Saint-Avold
en région rhénane occidentale limitrophe au francique mosellan il y a un début
de diphtongaison:
(construire d'est en
ouest) böje (G) à böwe (G)à bowwe (G)à boiwen (G)à bauen (E + F). On
remarque le "oi" du boiwen de Saint-Avold qui le rapproche de la
diphtongue "au" des zones E/F.
Donc, on peut retenir l'idée
générale que, dans la famille francique majoritairement favorable aux diphtongues,
il existe deux îlots qui n'ont pas accepté la diphtongaison et qui privilégie
généralement les sons brefs ou monophtongués : partie sud de la zone G et
la zone D/C. Pour la zone C, il n'y a pas de surprise puisqu'elle appartient
au bas-allemand qui n'a pas adopté la diphtongaison. La zone D, pays de Cologne,
est aussi une région de transition connue entre le moyen allemand et le bas-allemand.
En revanche, on observe que la partie mosellane de la zone G est bien encerclée
par des dialectes qui ont adopté les diphtongues.
Prenons deux exemples : la
maison (das Haus en allemand), mon (mein
en allemand)
La forme "min"
(identique à l'alsacienne voisine) est indubitablement la plus brève de tout le
bassin francique puisque le "meen" du centre est long (prononcez un
" é " long).
En observant les langues
et dialectes franciques, on s'aperçoit à l'œil nu ou à l'oreille qu'ils ont un
traitement particulier de la lettre G.
Il est très difficile de
synthétiser ce sujet sur une carte, il faut rester dans les grandes tendances.
La zone bleue est celle qui prononcent le G à tendance vélaire dans toutes les
situations (proche de l'allemand CH dans Bach) même si, en réalité, il existe
trois nuances de ce même son suivant la position dans le mot.
Ainsi, on ne prononce
surtout pas GU dans geven, berg, dag ou Gouda.
La zone verte forme la
transition entre le nord et le sud du bassin allemand. Suivant les zones, il
existe encore des variations importantes comme dans la zone rhénane: En rhénan
de Moselle, on trouve côte à côte saan,
Daa et Berch, Trooch (sagen, Tag, Berg, Trog) alors qu'en pays hessois, on
entend saache, Daach, Berch, Trooch.
La zone jaune (francique
rhénan du sud-est mosellan) atténue le G en W ou J, en finale il peut
disparaître : sàwe, Dàà, Berri. En cela, il est apparenté à l'alsacien
bas-rhinois.
En revanche, la zone verte
+ jaune conserve le G en début de mot:
Geld, Gold, Grabb, gudd.
On remarque bien la
correspondance G / CH dans la finale des adjectifs orthographiés –ig en
allemand standard mais prononcé –ich ou –isch dans les dialectes franciques (ferdich = fertig). De
la même manière pour les verbes en –igen qui donnent –iche, -ichen ou –ische
(beruhigen à beruhische, beruhichen).
Il ne faut croire qu'il
n'y a donc pas de G en francique central et oriental car ces
dialectes ont souvent la tendance de prononcer le son " k " tellement
atténué qu'on entend plutôt un "G" : drìggen pour drücken (presser).
En conclusion, sur ce son,
il est un signe distinctif des parlers franciques vis-à-vis :
Un autre son typique de la
famille francique qui le rapproche du nord et non du haut-allemand est le
B en W.
C'est à peu près la même
chose que pour le G. A l'exception du B en début de mot, on constate que le B
s'affaiblit en W ou disparaît dans certains cas. Là aussi, l'alémanique du
Bas-Rhin semble avoir été influencé par le francique quand on le compare au
haut-rhinois.
Il faut prononcer le W
comme un V français. C'est pour cette raison que nous avons écrit un V sur la
carte dans les pays néerlandais où le W se prononce comme en anglais (water).
Attention, le V néerlandais est à mi chemin entre le V et le F.
Quand le W est lui-même
atténué, il disparaît : gewwen à gènn, notamment
dans les dialectes de Moselle.
La zone G est donc très
diversifiée. Un Hessois dira "hawwe" quand un francique rhénan de
Moselle dira "hànn" ou "hänn".
Conclusion:
La famille francique
traverse les aires dialectales dans la continuité. On trouve des régions
tampons qui servent de tremplin à l'espace dialectal suivant. Il existe une
interpénétation consécutive qui permet un passage sans heurts d'une zone à
l'autre.
La zone B (Limbourg) fait
la jonction entre le bas-francique et le moyen allemand.
La zone C (Pays de Clèves
– Xanten) fait la transition entre le bas-francique et le bas-allemand
La zone D (Pays de Cologne-
Aix-la-Chapelle) fait la jonction entre le moyen et le bas allemand
La zone E (Pays de Trèves
– Boulay) fait la jonction entre le rhénan et le luxembourgeois.
La one G pointe sud-est en
France (Pays de Sarrebourg – Bitche - Lauterbourg) fait la jonction entre le
francique et l'alémanique.
La zone H (Pays de
karlsruhe – Pforzheim) fait la jonction entre le francique et le souabe.
La zone I (Pays de
Wurzbourg – Nuremberg) fait la jonction entre le francique oriental et le
bavarois.
La zone A (Pays-Bas) a,
comme évoqué plus haut, une bande occidentale faisant la transition vers le
bas-saxon (Plattdütsch).
Le francique a majoritairement adopté la diphtongaison, ce
qui fait des Mosellans parlant le rhénan un cas particulier dans la famille.
Le francique a gardé le P
dans de nombreuses situations, totalement à l'ouest (Bénélux), partiellement à
l'est.
Le francique a deux
variantes possibles d'un même mot parce
qu'il est traversé par des lignes repères à peu près en son centre.
Le bas-francique se
distingue des autres par le fait qu'il est séparé des autres par la ligne du K
/ CH (maken / machen)
Le francique oriental se
détache des autres par le fait qu'il a adopté la mutation du P en PF comme ses voisins haut-allemands (Appel
/ Apfel, Perd / Pferd)
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